Allitération
"UN JEU DE MIROIRS ANALOGUE À CELUI DES RIMES"
Dès ses premiers poèmes, Rimbaud manie avec virtuosité le jeu des combinaisons sonores. Louis Aragon dit quelque part qu'il élève la technique des assonances et des allitérations à la hauteur d'un "jeu de miroirs analogue à celui des rimes" (Louis Aragon, Blanche ou l'oubli, 1967, Folio, p.79).
Observons par exemple l'effet voluptueux des allitérations en /s/ dans les dernières strophes des Chercheuses de poux :
[...]
Il écoute chanter leurs haleines craintives
Qui fleurent de longs miels végétaux et rosés,
Et qu'interrompt parfois un sifflement, salives
Reprises sur la lèvre ou désirs de baisers.
Il entend leurs cils noirs battant sous les silences
Parfumés ; et leurs doigts électriques et doux
Font crépiter parmi ses grises indolences
Sous leurs ongles royaux la mort des petits poux.
Voilà que monte en lui le vin de la Paresse,
Soupir d'harmonica qui pourrait délirer ;
L'enfant se sent, selon la lenteur des caresses,
Sourdre et mourir sans cesse un désir de pleurer.
Ces vers exploitent les allitérations en /s/ pour faire ressortir l'idée de silence, une impression de promiscuité et de douceur, la sensation physique du souffle des jeunes filles dans le cou de l'enfant. D'autres effets sonores se combinent avec le précédent; assonances en (/ã/) : "Il entend leurs cils noirs battant sous les silences"; reprises de la séquence /ir/ : désirs, désir, délirer, mourir, soupir; et de nombreuses