amadou koné: roman et tradition
Pierre Fandio
Universite de Yaounde
S'il
est des aspects de la litterature africaine qUi ne peuvent laisser indifferent un lecteur, l'attitude des auteurs a l'egard de la tradition est de ceux-la. En fait, la tradition entendue comme l'«habitude qui est socialement apprise et socialement transmise [...]
Ce qui se fait dans une societe donnee en reference a un systeme de valeurs plus ou moins implicite,»1 suscite chez les ecrivains africains des reactions dont se degagent trois tendances majeures.
Pour les uns, la tradition est une reference immuable qui doit regir la vie de l'Africain contemporain. Cette attitude, plus souvent proclamee que pratiquee, est defendue par certains tenors de la Negritude qUi pronent le «retour aux sources» des valeurs traditionneIles de l'Afrique. Kotia-Nimi de Boubou-Hama se veut l'apologie de la defense de l'illustration des modeles de penser et d'agir ancestraux. Deja,
Senghor n'avait pas hesite a affirmer dans la postface d'Ethiopiques: «Si l'on veut me trouver des maitres, il serait plus sage de les chercher du cote de l'Afrique.»3
Face aux defenseurs acharnes du cuIte du passe, d'autres auteurs militent pour la liquidation pure et simple de cette «valeur refuge» selon Franz Fanon,4 n'est que mystification, archeologie litteraire, "folklore." EIle apparait aux yeux de TChicaya U
Tansi comme «un autre ghetto, un piege, une diversion,» et la suivre serait «danser a rebours} la chanson de l'evolution du monde. La jeune generation est plus radicale: la tradition est un obstacle epistemologique. «Chez nous, declare un personnage de
Medou Mvomo, la tradition s'oppose a l'innovation et le malheur est que le progres de notre pays ne pourra chausser les bottes des sept lieues que lorsque la seconde aura triomphe de la premiere.»6
Entre les deux positions se developpe une attitude mediane qui, tout en s'effon;ant d'integrer les arguments des deux bords, pense qu'il est possible