Amelie nothomb
De cette masse en souffrance, si avide d’un événement dans l’immobilité anonyme de leur vie, se détachent les autres, à qui il arrive quelque chose, cette souffrance par laquelle, paradoxalement, ils cessent d’être en souffrance. La mise en spectacle de cette souffrance à laquelle il est impossible d’échapper- à partir de rafles qui les enferment dans un camp de concentration où les tortures verbales et physiques et surtout les mises à mort seront filmées par les caméras de la télévision - si avidement désirée par la masse anonyme des spectateurs, semble être comme une accélération d’un processus de sortie radicale qui est la fantaisie mise en acte d’une prise en mains des corps violente et définitive, une scène d’érotisme total, une scène d’arrachage. Les spectateurs veulent voir, c’est cela que nous lisons entre les lignes du roman d’Amélie Nothomb, le spectacle de leur naissance comme la mort à leur état d’anonyme dans le ventre de l’ombre. Le spectacle des tortures et de la mise à mort est la preuve que « ça » prend en mains, que « ça » saisit le corps, qu’il y a sous cette forme spéciale d’érotisme sado-masochiste un désir de prendre en main des corps pour les arracher lentement et sûrement, pour les accoucher par procuration.