Amour - Illusion Comique (Corneille)
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.. CORNEILLE est encore timide et hésitant; ses premières oeuvres comiques s'achèvent sur une interrogation; avant la tragédie du CID, L'ILLUSION COMIQUE est cette ultime interrogation. Une sorte d'angoisse donne à cette pièce des couleurs et des éclats de fête foraine, projette sur l'écran de la grotte magique une humanité de songe, des attitudes et des voix de marionnettes curieusement déformées. Le montreur d'images annonce le spectacle, les spectres parlants, la fantasmagorie. Sous nos yeux tremblent des habits de comédiens, pourpre et or, un équipage somptueux et princier; ces tissus éclatants, ces couronnes et ces bijoux, cette toilette de femme, nous les retrouverons un peu plus tard : des corps vivants les rempliront pour une tragique journée. Mais on n'est pas encore à ce rêve dans un rêve, à cette illusion dans L'ILLUSION. Avant que les images de la vie paraissent, pourquoi soudain ces objets de merveille, ces artifices, ces instruments et ces accessoires de la parade scénique?
Est-ce le théâtre de la vie qui est ainsi annoncé? Ou bien la vie du théâtre? Qui joue ici, l'acteur ou l'homme? Et que projette-t-on : le réel ou l'apparence, la vérité ou le mensonge, le commerce des vivants ou celui des ombres?
On venait à peine de quitter ces deux amis, l'un breton, l'autre tourangeau; de suivre leur conversation, et leur promenade à travers la campagne de Touraine jusqu'à cette grotte du magicien Alcandre où règne une nuit qui "n'ouvre son voile épais qu'aux rayons d'un faux jour". Le théâtre! La rampe entre le spectateur et le spectacle, cette large bouche comme un mur invisible où l'air devient inaccessible, le cercle magique qui sépare le monde des vivants de la féerie heureuse ou sanglante.
Cela pourtant semblait commencer comme la vie même, ce père qui par trop de sévérité a chassé son fils Clindor, et, désolé maintenant de l'avoir perdu, s'est mis à sa recherche par tous les pays. Bien vainement. Auprès du Magicien il regarde la toile aux