Analyse du pont mirabeau
Au plan rythmique, on observe l’alternance de quatrains en vers pairs (décasyllabes, vers de 4 et 6 syllabes) et de distiques en vers impairs ( 7 syllabes) qui font office de refrain. L’alternance entre la force eduscol du vers pair et l’instabilité de l’impair renvoie au balancement entre fluidité (fleuve et sentiments) et permanence du « je » qui les éprouve. La substitution ponctuelle de l’assonance (amours/sous) à la rime, la récurrence de certains sons (ou / a / ai ...), la prédominance des rimes féminines - combinées à la nostalgie des sentiments qui s’expriment - renforcent le climat de tristesse incertaine.
« L’irrégularité relative de la métrique (alternance pair/impair, mélange des types de vers), la liberté prise parfois par rapport à la rime, l’absence de ponctuation et les effets d’équivocité syntaxique ainsi produits (v. 14-15-16), l’audace de certains enjambements (v. 8-9) sont les signes, assez discrets ici, de la libération par rapport à une codification formelle stricte, libération qui caractérise la poésie du XXème siècle. ».
Si le thème de la fuite du temps, de la jeunesse et des amours est privilégié par les poètes d’époques diverses, il se double souvent d’une exhortation à jouir du moment présent (référence possible au Carpe diem antique). Ce n’est pas vraiment le cas chez Apollinaire, qui substitue à l’invitation pressante d’un Ronsard une sorte de déploration paisible mais doucement résignée. La petite musique est ici désenchantée et le poète semble insister sur l’impermanence et la disparition (Ni temps passé ni les amours