Analyse politique du burkina faso
DOSSIER
Le Burkina Faso : l’alternance impossible
Coordonné par Mathieu Hilgers et Jacinthe Mazzocchetti
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Introduction au thème
L’après-Zongo : entre ouverture politique et fermeture des possibles
« C’est difficile. Tu sors aujourd’hui, tu sais que si tu te courbes, on te nomme directeur quelque part. Tu restes sur ta position, ta vieille [mobylette] P50 va te conduire dans les rues de Ouaga jusqu’à ce que tu crèves. Où est l’alternative ? Il n’y en a pas. Vivre même… Quand on dit vivre aujourd’hui, c’est quoi ? On fait tout pour mettre des barrières, pour dire à la jeunesse burkinabè qu’il n’y a pas d’espoir ni d’alternative. Laissez-nous gérer pour vous, on connaît mieux gérer que vous. Moi, j’ai peur qu’à ce rythme-là, le système absorbe tout le monde. Je ne vais pas indexer un parti politique parce qu’ils sont tous dedans. Les gens ont compris qu’il faut rentrer dans le système et tu avances. Aujourd’hui, tout ce qu’on te demande, c’est de faire comme les autres. » [propos recueillis par J. Mazzocchetti auprès d’un journaliste de 32 ans, diplômé en sociologie, Ouagadougou, 2005]
la suite de la crise politique déclenchée par l’assassinat du journaliste Norbert Zongo en 1998 et des bons résultats de l’opposition aux élections municipales de 2000 et législatives de 2002, certains analystes soulignaient que la situation politique du Burkina Faso se caractérisait par une « ouverture des possibilités » et que les Burkinabè pensaient « l’alternance […] possible 1 ».
À
1. A. Loada et C. Santiso, « Élections au Burkina Faso : vers une maturité démocratique ? », .
LE
DOSSIER
6 Le Burkina Faso : l’alternance impossible
Si, en 2003, on pouvait encore se demander si le président Blaise Compaoré tiendrait la distance jusqu’à l’élection présidentielle, aujourd’hui la question est plutôt de savoir si le Burkina est un pays sans opposition 2. En ce qui concerne les institutions politiques formelles, l’élection présidentielle du 13