Anthologie
Entendant des sanglots, je poussai cette porte.
Les quatre enfants pleuraient et la mère était morte. Tout dans ce lieu lugubre effrayait le regard. Sur le grabat gisait le cadavre hagard ; C’était déjà la tombe et déjà le fantôme. Pas de feu ; le plafond laissait passer le chaume. Les quatre enfants songeaient comme quatre vieillards. On voyait, comme une aube à travers des brouillards, Aux lèvres de la morte un sinistre sourire ; Et l’aîné, qui n’avait que six ans, semblait dire : « Regardez donc cette ombre où le sort nous a mis ! »
Un crime en cette chambre avait été commis. Ce crime, le voici : – Sous le ciel qui rayonne, Une femme est candide, intelligente, bonne ; Dieu, qui la suit d’en haut d’un regard attendri, La fit pour être heureuse. Humble, elle a pour mari Un ouvrier ; tous deux, sans aigreur, sans envie, Tirent d’un pas égal le licou de la vie. Le choléra lui prend son mari ; la voilà Veuve avec la misère et quatre enfants qu’elle a. Alors, elle se met au labeur comme un homme. Elle est active, propre, attentive, économe ; Pas de drap à son lit, pas d’âtre à son foyer ; Elle ne se plaint pas, sert qui veut l’employer, Ravaude de vieux bas, fait des nattes de paille, Tricote, file, coud, passe les nuits, travaille Pour nourrir ses enfants ; elle est honnête enfin. Un jour, on va chez elle, elle est morte de faim.
Oui, les buissons étaient remplis de rouges-gorges, Les lourds marteaux sonnaient dans la lueur des forges, Les masques abondaient dans les bals, et partout Les baisers soulevaient la dentelle du loup ; Tout vivait ; les marchands comptaient de grosses sommes ; On entendait rouler les chars, rire les hommes ; Les wagons ébranlaient les plaines ; le steamer Secouait son panache au-dessus de la