Anthologie
Ma bohème
Je m'en allais, les poings dans mes poches crevées;
Mon paletot soudain devenait idéal;
J'allais sous le ciel, Muse, et j'étais ton féal;
Oh! Là là! Que d'amours splendides j'ai rêvées!
Mon unique culotte avait un large trou.
Petit-Poucet rêveur, j'égrenais dans ma course
Des rimes. Mon auberge était à la Grande-Ourse.
Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou
Et je les écoutais, assis au bord des routes,
Ces bons soirs de septembre où je sentais des gouttes
De rosée à mon front, comme un vin de vigueur;
Où, rimant au milieu des ombres fantastiques,
Comme des lyres, je tirais les élastiques
De mes souliers blessés, un pied près de mon cœur!
Arthur Rimbaud
Blaise Cendrars, Feuilles de route, 1924 Iles
Iles
Iles
Iles où l’on ne prendra jamais terre
Iles où l’on ne descendra jamais
Iles couvertes de végétations
Iles tapies comme des jaguars
Iles muettes
Iles immobiles
Iles inoubliables et sans nom
Je lance mes chaussures par-dessus bord car je voudrais bien aller jusqu’à vous
Guillaume Apollinaire, Ondes, Calligrammes 1918
À travers l’Europe
A M. Ch.
Rotsoge
Ton visage écarlate ton biplan transformable en hydroplan Ta maison ronde où il nage un hareng saur
Il me faut la clef des paupières
Heureusement que nous avons vu M Panado
Et nous somme tranquille de ce côté-là
Qu’est-ce que tu vois mon vieux M.D…
90 ou 324 un homme en l’air un veau qui regarde à travers le ventre de sa mère
J’ai cherché longtemps sur les routes
Tant d’yeux sont clos au bord des routes
Le vent fait pleurer les saussaies
Ouvre ouvre ouvre ouvre ouvre
Regarde mais regarde donc
Le vieux se lave les pieds dans la cuvette
Una volta ho inteso dire chè vuoi je me mis à pleurer en me souvenant de vos enfances
Et toi tu me montres un violet épouvantable Ce petit tableau où il y a une voiture m’a rappelé le jour
Un jour fait de morceaux mauves jaunes bleus verts et rouges
Où je m’en allais à la