Anthologie
Amour me tue.
( Recueil : Premier livre des Odes 1545)
Amour me tue, et si je ne veux dire Le plaisant mal que ce m'est de mourir : Tant j'ai grand peur, qu'on veuille secourir Le mal, par qui doucement je soupire.Il est bien vrai, que ma langueur désire Qu'avec le temps je me puisse guérir : Mais je ne veux ma dame requérir Pour ma santé : tant me plaît mon martyre.Tais-toi langueur je sens venir le jour, Que ma maîtresse, après si long séjour, Voyant le soin qui ronge ma pensée, Toute une nuit, folâtrement m'ayant Entre ses bras, prodigue, ira payant Les intérêts de ma peine avancée.Pierre de Ronsard Mignonne, allons voir si la rose.
( Recueil : Premier livre des Odes 1545)
Mignonne, allons voir si la rose Qui ce matin avoit desclose Sa robe de pourpre au Soleil, À point perdu ceste vesprée Les plis de sa robe pourprée, Et son teint au vostre pareil.Las ! voyez comme en peu d'espace, Mignonne, elle a dessus la place Las ! las ses beautez laissé cheoir ! Ô vrayment marastre Nature, Puis qu'une telle fleur ne dure Que du matin jusques au soir !Donc, si vous me croyez, mignonne, Tandis que vostre âge fleuronne En sa plus verte nouveauté, Cueillez, cueillez vostre jeunesse : Comme à ceste fleur la vieillesse Fera ternir vostre beauté.
Alphonse de Lamartine Souvenir.
( Recueil : Méditations poétiques 1820)
En vain le jour succède au jour, Ils glissent sans laisser de trace ; Dans mon âme rien ne t'efface, Ô dernier songe de l'amour !Je vois mes rapides années S'accumuler derrière moi, Comme le chêne autour de soi Voit tomber ses feuilles fanées.Mon front est blanchi par le temps ; Mon sang refroidi coule à peine, Semblable à cette onde qu'enchaîne Le souffle glacé des autans.Mais ta jeune et brillante image, Que le regret vient embellir, Dans mon sein ne saurait vieillir Comme l'âme, elle n'a point d'âge.Non, tu n'as pas quitté mes yeux ; Et quand mon regard solitaire Cessa de te voir sur la terre, Soudain je te vis dans les cieux.Là, tu