Anti-héros
La notion et le terme se sont néanmoins accrédités depuis la publication , en 1864, de la deuxième partie (‘ A propos de neige fondue ‘) du Sous-sol de Dostoïevski. Le romancier y envisage l’antihéros dans la vie comme dans le récit et son narrateur dit précisément : ‘ Raconter tout au long comment j’ai manqué ma vie en me déshabituant à vivre, en rageant sans cesse dans mon sous-sol ‘ non, vraiment, ce n’est pas intéressant. Pour faire un roman il faut un héros, mais moi, comme si je faisais exprès, j’ai réuni ensemble tous les traits d’un antihéros ‘. Au sentiment d’un échec, il associe le ‘ dégoût ‘ devant la ‘ vie réelle ‘ et la ‘ vie vivante ‘ (que Dostoïevski oppose dans toute son œuvre à une ratiocination stérile), la vie vécue comme une ‘ peine ‘, une agitation dont on ignore le but.
Mais le terme n’est utilisé en critique littéraire qu’à partir des années 1960, pour désigner des personnages qui , eux, se sont multipliés surtout à partir du XIXème siècle.
Certes, comme l’a montré Nathan A. Cervo, dans son article ‘ Anti-Hero ‘ (in Seigneuret J.-Ch.- Dictionary of Literary Themes and Motifs. ‘ N.Y ; Westport ; London : Greenwood Press, 1988, pp.59-65), ce type de personnage serait déjà apparu dans l’Iliade d’Homère (VIIIème siècle avant notre ère), sous la forme de Thersite. Celui-ci passait pour le plus laid et le plus lâche des Grecs qui assiégeaient Troie, s’en prenait volontiers à ses chefs, injuriait tout le monde et pratiquait le persiflage aux dépens de son entourage. Ces quelques vers du Chant II sont éloquents : ‘ Thersite, seul, persiste à piailler sans mesure. Son cœur connaît des mots malséants, à foison, et, pour s’en