Aragon - je vous salue ma france
(1943)
Poème
Commentaire
Alternance alexandrins-octosyllabes. C’est un long cri de protestation contre la terreur nazie, contre la trahison des pétainistes, contre l’asservissement provisoire du pays. Mais aussi un beau chant d'amour pour la France où Aragon manifesta une confiance sereine dans l'avenir et le destin de sa patrie car il s’achève sur I’horizon entrevu de la liberté.
Le titre s’explique parce que, dans la première partie, Aragon considère les Allemands et les collaborateurs comme déjà perdus et, tels de sinistres statues de cire, bons pour le Musée Grévin.
Dans la dernière partie, abandonnant les «fantômes», il revient à ce «pays dévasté par la peste / qui semble un cauchemar attardé de Goya…») et où arrivent les nouvelles des camps de la mort : «Auschwitz Auschwitz ô syllabes sanglantes.» Il évoque les femmes patriotes déportées à Auschwitz : Maïe (Politzer), Danièle (Casanova), qui y moururent, Marie-Claude (Vaillant-Couturier), qui en revint, et c'est à elles que s'adresse le vers qui ouvre le finale du poème : «Je vous salue Maries de France aux cent visages.» Dans la septième et dernière partie du poème, il entrevoit l’horizon de la liberté et, donnant la parole à un des prisonniers, des déportés, des maquisards, qui revient au foyer, écrit un hymne à la patrie qu'il voyait déjà rendue à la liberté et à la vie pacifique au bout de plusieurs années de nuit et de souffrances :
Analyse
Ces strophes sont, dans l'ensemble, conformes à la poésie régulière et traditionnelle, mais l'auteur se permit un certain nombre de libertés. Il rima pour l'oreille sans égard à la nature féminine ou masculine des rimes : par exemple, il fit rimer «calmèrent» avec «mer», «habitée» avec «diversité». Il n'observa pas la règle de l'alternance des rimes féminines et des rimes masculines : ainsi «passage» (rime féminine) suit «confie» (rime féminine) aux strophes 3 et 4 ; à la strophe 5, «aigle» est suivi par «habitée» (deux rimes