Avenue des géants / Marc Dugain
Gallimard, 2012 – 360 p. – 21€50 ISBN : 978-2-07-4013235-5

Dans ce récit intérieur d’un tueur en série américain, Marc Dugain s’inspire de la vie d’Edmund Kemper (alias Al Kenner dans le roman) qui défraya la chronique aux Etats-Unis dans les années 1960-1970 pour avoir tué ses grands-parents à l’âge de 14 ans. Après 5 ans de soins psychiatriques, il est mis en liberté conditionnelle car il est considéré comme guéri du point de vue des psychiatres. Il faut préciser qu’il est très intelligent, avec un QI supérieur à celui d’Einstein, et qu’il s’exprime très bien sur ce qu’il est et sur ce qui va mal en lui. Il a du mal à trouver sa place dans une société en pleine mutation, meurtrie par la guerre du Vietnam et l’assassinat de Kennedy. Il se retrouve seul pour lutter contre « ses mauvaises pensées » et pour tenter de vivre « normalement » .
Al Kenner est un être en souffrance, rejeté par ses camarades et par sa famille, maltraité et nié par sa mère déséquilibrée. Selon Marc Dugain, s’il dérape c’est aussi en raison d’un père défaillant qui disparait sans jamais donner de nouvelles lorsque son fils commet l’irréparable .
Dans sa volonté de comprendre le cheminement d’un homme confronté à des circonstances familiales, sociales et psychologiques qui l’enferment et le conduisent à la folie, Marc Dugain nous rend ce personnage attachant alors que son cheminement est terrifiant. Il nous fait réfléchir sur le meurtrier en série ; un meurtrier sommeille en chacun de nous mais qu’est-ce qui fait que l’on passe à l’acte ?
L’écriture est simple et très fluide. La construction du récit est très bien menée : ainsi lorsque le roman débute Al est toujours en prison ; le lecteur le sait mais en ignore la raison jusqu’à la fin. « Aujourd’hui Ed Kemper vit encore. Il lit des livres aux aveugles et est un prisonnier exemplaire. Il dit qu’il ne tuera plus car il a enfin fait taire cette mère qui répétait sans cesse qu’elle avait enfanté