À Madamme de Montespan
VII à XI). Dans un avertissement (que je n’ai pas reproduit ici), le fabuliste nous dit avoir changé de méthode il ne se contente plus de travailler sur des canevas ésopiques mais il élargit son inspiration à d’autres fabulistes (Pilpay, Locman,…) ainsi qu’à la sagesse orientale (version arabe de "Pantchatantra"). Il s’inspire également de divers dramaturges dont nous aurons l’occasion de reparler. Le Livre VII est dédié à la favorite du roi depuis dix ans, Madame de Montespan. Celle-ci, à trente-sept ans reste très puissante même si elle est écartée des affaires politiques. Nous avons vu cependant qu’une personnalité comme
Lully peut lui résister et refuser le livret de "Daphné" que lui présente La Fontaine à la demande de la Montespan et de sa sœur.
L'apologue est un don qui vient des Immortels (1);
Ou, si c'est un présent des hommes,
Quiconque nous l'a fait mérite des autels:
Nous devons, tous tant que nous sommes,
Eriger en divinité
Le sage (2) par qui fut ce bel art inventé.
C'est proprement un charme: il rend l'âme attentive,
Ou plutôt il la tient captive,
Nous attachant à des récits
Qui mènent à son gré les coeurs et les esprits.
O vous qui l'imitez (3), Olympe (4), si ma muse
A quelquefois pris place à la table des dieux,
Sur ses dons aujourd'hui, daignez porter les yeux;
Favorisez les jeux où mon esprit s'amuse.
Le temps qui détruit tout, respectant votre appui,
Me laissera franchir les ans dans cet ouvrage:
Tout auteur qui voudra vivre encore après lui
Doit s'acquérir de votre suffrage.
C'est de vous que mes vers attendent tout leur prix:
Il n'est beauté dans nos écrits
Dont vous ne connaissiez jusques aux moindres traces.
Eh! Qui connait que vous les beautés et les grâces?
Paroles et regards, tout est charme dans vous.
Ma muse, en un sujet si doux,
Voudrait s'étendre davantage;
Mais il faut réserver à d'autres (5) cet emploi;
Et d'un plus grand maître que moi