Bertrand Solet, Les chiens de Baptistin Etienne.
Nous arrivons au début de décembre, il commence à faire froid. En guise de vêtements, je n’ai rien ou presque. Des lambeaux de ma blouse grise, enroulés autour de mes pieds, font office de chaussettes. Mes pantalons courts n’en peuvent plus, ni mon veston, ni ma chemise. Je porte un sac, ayant contenu des grains pour les moutons, pour tenir lieu de manteau.
Le maître refuse de m’acheter quoi que ce soit : « Je ne veux pas dépenser pour toi plus que tu ne gagnes… ». J’ai beau insister, c’est peine perdue…je rêve surtout d’un pantalon long, pour le froid et aussi pour me préserver les jambes des broussailles… comment faire sans un sou ?
Or, un jour, mon chien Sicard se met à gratter le sol avec ses pattes sous un chêne. Intrigué, je l’arrête et je continue délicatement sa besogne, à l’aide de mon fouet. Je découvre alors ma première truffe. Il s’avère que, dans sa jeunesse, Sicard a été dressé pour la recherche de ces champignons. Je me garde bien d’en parler à mon patron, et nous continuons notre cueillette les jours suivants, un peu partout dans les bois.
Un vieux berger du voisinage accepte volontiers d’être mon complice. Tous les samedis, il porte désormais les truffes à Banon, les vend pour mon compte et me donne l’argent. Après quelques semaines, je réunis la somme nécessaire. Et un jour, sur le bord du chemin, j’attends un de ces marchands qui passent régulièrement par les campagnes, offrant toutes sortes de choses entassées dans leur voiture.
Le soir, tandis que je rentre le