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Le chêne et le roseau
Le chêne un jour dit au roseau : « N'êtes-vous pas lassé d'écouter cette fable ? La morale en est détestable; Les hommes bien légers de l'apprendre aux marmots. Plier, plier toujours, n'est-ce pas déjà trop
Le pli de l'humaine nature ? » « Voire, dit le roseau, il ne fait pas trop beau ; Le vent qui secoue vos ramures
(Si je puis en juger à niveau de roseau) Pourrait vous prouver d'aventure, Que nous autres, petites gens, Si faibles, si chétifs, si humbles, si prudents, Dont la petite vie est le souci constant, Résistons pourtant mieux aux tempêtes du monde
Que certains orgueilleux qui s'imaginent grands. » Le vent se lève sur ces mots, l'orage gronde. Et le souffle profond qui dévaste les bois, Tout comme la première fois, Jette le chêne fier qui le narguait par terre. « Hé bien, dit le roseau, le cyclone passé
- Il se tenait courbé par un reste de vent
Qu'en dites-vous donc mon compère ?
(Il ne se fût jamais permis ce mot avant.) Ce que j'avais prédit n'est-il pas arrivé ? » On sentait dans sa voix sa haine
Satisfaite. Son morne regard allumé. Le géant, qui souffrait, blessé,
De mille morts, de mille peines, Eut un sourire triste et beau
Et, avant de mourir, regardant le roseau, Lui dit : « Je suis encore un chêne ».
Jean Anouilh, Fables (1962).
LE LOUP, LA LOUVE ET LES LOUVETAUX. Le loup, l’horrible loup qui fait peur aux enfants,
Le loup maigre et cruel qui guette,
Assassin précis, l’innocent
Et l’emporte poissé de sang,
Rentre au foyer le soir où les siens lui font fête
Et s’écrie : " Vilains garnements,
J’espère qu’aujourd’hui vous avez été sages ?
Quand les petits loups sont méchants
Jésus pleure dans les nuages.
Votre maman n’a pas à se plaindre de vous ? "
" Non, non, s’écrient les petits loups,
Dis-lui, maman, de vraies images.
On s’est même laissé lécher
Sans pleurer !
Que nous apportez-vous, papa, pour récompense ? "
" Un beau