Raymond Radiguet, né en 1903, fut un auteur d'une précocité étonnante. Il produisit son chef-d'œuvre, Le Diable au corps, entre seize et dix-huit ans. Tout comme son second roman, Le Bal du comte d'Orgel, le Diable au corps fut publié en 1923, l'année même de sa mort. Il n'avait alors que vingt ans. Cette publication provoqua un scandale, en raison de la jeunesse des protagonistes, mais surtout en raison du manque de respect qui en ressortait à l'égard des vaillants combattants du conflit mondial encore très proche. Le roman semblait justifier l'adultère de Marthe dont le mari se battait au front. Mais on reconnaissait par ailleurs la prouesse du jeune romancier. Toute trace de scandale a disparu des jugements contemporains pour ne laisser place qu'à l'admiration. L'on retrouve en arrière plan du roman de Radiguet, roman au style clair et épuré une critique sociale du milieu bourgeois, petit bourgeois, en l'occurrence. Le conformisme, la bassesse des habitants de la petite commune des bords de Marne qui a tout d'une petite ville provinciale, sont brossés avec la cruauté d'un adolescent de dix-sept ans. Voici le livre. Un roman d'analyse, un roman de l'amour et de l'adolescence. La première guerre mondiale a éclaté. Pour le narrateur, c'est le début des grandes vacances. Il rencontre Marthe, une jeune fille fiancée par raison. Bientôt Marthe se retrouve seule, tandis que Jacques, devenu son mari, est parti au combat. Entre elle et le jeune garçon naît un amour, total de la part de Marthe, mi-cynique, mi-sincère de la part du narrateur. Ils deviennent amants. Bien qu'il soit rival de celui-là, le jeune homme tente d'atténuer l'inconsciente cruauté dont fait preuve Marthe à l'égard de son mari, et d'adoucir le ton des lettres qu'elle lui envoie. Lui-même ne sait trop quoi penser de son amour. S'achèvera-t-il, comme le font beaucoup de passions, dans l'indifférence ? Le destin en décidera autrement. Marthe annonce à son jeune amant qu'elle attend un enfant ; un enfant