| epuis Les Héritiers, la sociologie de l'école proposée par Bourdieu s'est imposée comme un paradigme. C'est une théorie « totale », formalisée dans La Reproduction, que l'on peut présenter comme un renversement critique des conceptions classiques de l'école et de l'éducation. Puisqu’il existe aujourd'hui un « Phénomène Bourdieu », parlons-en. Il y a au moins trois manières d'en traiter. La première est strictement politique : on s'interroge sur la « gauche de la gauche », sur ce qu'elle exprime et sur ses perspectives. La deuxième consiste à interroger le retour d'une forme d'engagement intellectuel, les rapports de la connaissance et de l'action, les stratégies et les réseaux mobilisés à cet effet. La troisième interrogation porte sur l'analyse de l’œuvre scientifique de Pierre Bourdieu, sur ses forces et ses faiblesses et sur les raisons de son succès. C'est cette dernière voie que je choisis de prendre dans le domaine où l’œuvre de Bourdieu a rencontré le plus d'écho : la sociologie de l'éducation. Depuis Les héritiers, la sociologie de l'école proposée par Pierre Bourdieu s’est imposée comme un véritable paradigme. C'est une théorie « totale » à l'égard de laquelle chacun se définit, qu'il y soit favorable ou hostile, et il faut bien admettre que la plupart des sociologues y ont été très longtemps favorables, concevant leurs travaux comme des prolongements ou comme des illustrations de cette théorie formalisée dans La Reproduction. On peut présenter la théorie de Bourdieu (elle fut aussi celle de Jean-Claude Passeron), comme un renversement critique des conceptions classiques de l'école et de l'éducation. Longtemps, l'éducation scolaire, notamment l’éducation républicaine, a été considérée comme une paideia permettant aux enfants d'accéder à une culture universelle et de construire par là-même une autonomie personnelle. Cet apprentissage était censé se réaliser dans une institution « neutre » régie par des lois propres, indépendantes des formes de