Bovarysme
Il est superflu d'insister ici sur la signification de cette expression : le Bovarysme. On sait que M. Jules de Gaultier part d'un fait de psychologie courante, que chaque homme a pu observer sur lui-même et dont Flaubert a montré l'évolution et décrit les effets dans l'âme de ses principaux personnages.
Ce fait est le bovarysme ou pouvoir qu'a l'homme de se concevoir autre qu'il n'est. Ce fait très simple est aussi très général. Nul n'échappe au bovarysme. Tout homme en subit la loi à des degrés divers et suivant des modes particuliers. Le Bovarysme est le père de l'illusion sur soi qui précède et accompagne l'illusion sur autrui et sur le monde ; il est l'évocateur de paysages psychologiques par lesquels l'homme est induit en erreur et en tentation pour sa joie et pour son malheur.
Mais le Bovarysme, d'après M. J. de Gaultier, ne reste pas confiné dans les limites étroites des âmes individuelles. Ce génie d'illusion s'irradie et s'épanouit dans l'âme des peuples et des races ; comme l'esprit léger d'Ariel, il s'insinue à tous les degrés de la mystérieuse vie universelle ; il vole, aérien et lumineux, semant autour de lui les mirages dont se dupent et s'enchantent l'humanité et l'univers.
On ne peut s'empêcher d'admirer dans ces perspectives sur le rôle du Bovarysme des Collectivités, du Bovarysme de l'Humanité et du Bovarysme de l'Etre universel, la marche sûre et hardie d'une dialectique qui saisit dans les cercles successifs de ses généralisations des espaces de réalité de plus en plus vastes. On dirait d'une de ces projections de lumière électrique qui lancées d'un endroit