Capitalisme et moralité
Si la réponse à cette question se fonde sur des constats objectifs (aggravation des inégalités, exploitation d'enfants...), elle est aussi liée à des présupposés culturels et religieux.
Dans les pays à dominante catholique, la défiance à l'égard du capitalisme prendrait sa source dans une condamnation ancienne : celle de l'usure et de l'enrichissement, déjà présente chez Aristote ou dans l'Ancien Testament.
Pour la philosophe et spécialiste d'éthique financière Geneviève Even-Granboulan, auteur d'un ouvrage récent sur ce thème (5): « Le catholicisme a longtemps été hostile au capitalisme et malgré une certaine atténuation de cette condamnation, cette réticence n'a pas été totalement levée. » Elle se retrouve notamment dans la condamnation des pratiques de spéculations financières.
Les mêmes explications ont été avancées au sujet des pays à dominante musulmane dans lesquels l'usure est encore une pratique condamnée (6).
Depuis L'Ethique protestante et l'Esprit du capitalisme de Max Weber, les pays protestants sont au contraire réputés mieux disposés au capitalisme. L'accumulation n'y est pas considérée comme une fin en soi mais un moyen d'une vie bonne. En ce sens, le capitalisme devient une discipline de tous les instants. Mais ce qui est vrai pour le capitalisme des origines l'est-il pour le capitalisme contemporain ? Différents auteurs en doutent en considérant que « les valeurs dont parle Weber (ont) été détruites depuis longtemps par l'envahissement de l'économique dans notre imaginaire »(7).
Toutefois, pour G. Even-Granboulan : « On fait souvent grief au capitalisme de son immoralité ; de fait, cette immoralité caractérise des formes imparfaites de capitalisme qui ne sont pas encore parvenues à maturité. On serait tenté de citer les exemples contemporains du développement anarchique du capitalisme mafieux à la russe ; ou encore l'appétit de jouissance d'un pays comme la Chine. Cette fièvre d'acquisition sans aucun frein