CASTEL, Robert, « De l’indigence à l’exclusion, la désaffiliation. Précarité du travail et vulnérabilité relationnelle. », dans DONZELOT, Jacques, (dir.), Face à l’exclusion. Le modèle français, Paris, Éditions Esprit, 1991, 137-168 p.

Thèmes : Pauvreté, chômage, dépendance, notions théoriques, France.

Résumé

L’auteur aborde le dénuement comme un effet, à la conjonction de deux vecteurs : l’axe d’intégration/non-intégration par le travail et l’axe d’insertion/non-insertion dans une sociabilité socio-familiale. La pauvreté apparaît comme la résultante d’une série de ruptures d’appartenances et d’échecs à constituer du lien qui, finalement, projettent le sujet en état de flottaison, dans une sorte de no man’s land social.

L’auteur définit trois zones de l’espace social selon le degré de cohésion qu’elles assurent :

Être dans la zone d’intégration signifie que l’on dispose des garanties d’un travail permanent et que l’on peut mobiliser des supports relationnels solides.
La zone de vulnérabilité associe précarité du travail et fragilité relationnelle.
La zone de désafilliation conjugue absence de travail et isolement social.
Ce modèle propose une classification différentielle des statuts en fonction de la cohésion sociale qui ne recouvre pas exactement la stratification économique. L’auteur tire trois implications de ce modèle et montre qu’il peut aussi aider à caractériser les types de populations qui relèvent aujourd’hui des interventions sociales.

« Premièrement, les frontières entre les zones sont poreuses. En particulier, la désaffiliation s’alimente dans la zone turbulente de la vulnérabilité, surtout si la précarité du travail est associée à la fragilité relationnelle et augmente en fonction de la conjoncture économique [...];

Deuxièmement, un bon score sur l’un des axes insertion/isolement peut compenser, au moins dans une certaine mesure, un mauvais score sur l’axe travail/non-travail, et réciproquement.(...) Le croisement des deux