CHAPITRE 1 Chien Jaune
Elles n'ont pas de volets mais, à travers les rideaux verdâtres, c'est à peine si on devine des silhouettes.
Et ces gens attardés au café, le douanier de garde les envie, blotti dans sa guérite, à moins de cent mètres. En face de lui, dans le bassin, un caboteur 1 qui, l'après-midi, est venu se mettre à l'abri. Personne sur le pont. Les poulies grincent et un foc 2 mal cargué 3 claque au vent. Puis il y a le vacarme continu du ressac, un déclic à l'horloge qui va sonner onze heures. la porte de l'hôtel de l'Amiral s'ouvre. Un homme paraît, qui continue à parler un instant à des gens restés à l'intérieur. La tempête le happe, agite les pans de son manteau, soulève son chapeau melon qu'il rattrape à temps, qu'il maintient sur sa tête tout en marchant. Même de loin, on sent qu'il est tout guilleret, mal assuré sur ses jambes et qu'il fredonne. Le douanier le suit des yeux, sourit quand l'homme se met en tête d'allumer un cigare. C'est une lutte comique qui commence entre l'ivrogne, son manteau que le vent veut lui arracher et son chapeau qui fuit le long du trottoir. Dix allumettes s'éteignent. Et l'homme au chapeau melon avise un seuil de deux marches, s'y abrite, se penche. Une lueur tremble, très brève. La fumée vaille, se raccroche au bouton de la porte. Est-ce que le douanier n'a pas perçu un bruit étranger à la tempête ? Il n'en est pas sûr. Il rit