"Les mythes sont faits pour que l'imagination les anime", écrivait Camus dans Le Mythe de Sisyphe. C'est une idée que Christian Delmas n'aurait pas renié, lui qui écrit que "la dimension politique et psychologique de la tragédie, loin d'affaiblir le sujet mythique ou historique, est la condition de son actualisation : plutôt que travesti ou véritablement reproduit, le sujet est réinterprété en termes modernes, et peut dès lors être investi de nouveau par l'imaginaire". En effet, pour le critique, la reprise et l'adaptation d'un sujet mythique ou historique pour la tragédie, loin de le desservir et de l'appauvrir, enrichit au contraire la source et lui permet de survivre en entreprenant sa réactualisation dans l'époque. Le sujet mythique ainsi remis au gout du jour, pourra convenir aux normes esthétiques de l'époque mais aussi servir de nouveau départ pour d'autres interpretations, servant ainsi l'intertextualité. La nouvelle modernité du mythe induit des changements et suppose qu'il n'est plus celui qu'il était au départ, mais pour Delmas ce changement est plus de l'ordre de l'enrichissement que de l'appauvrissement, et même si le sens premier est un peu laissé de côté, sa réinterpretation pourra lui assurer la perrenité et une nouvelle visibilité. Ce qui permet cette actualisation, c'est la tragédie et sa capacité, au travers sa dimension politique et psychologique, à donner de nouveaux enjeux au mythe, c'est à dire sa capacité à représenter l'intrigue à l'échelle de la Cité entière et de donner une épaisseur psychologique à des héros de papier. Nous verrons comment cette thèse de Mr Delmas peut être discutée en nous appuyant sur deux oeuvres : le Pyrame et Thisbé de Théophile de Viau, et le Nicomède de Corneille. Avec l'aide de ce corpus, nous nous demanderons comment la "théatralisation" d'un mythe ou d'une donnée historique peut l'actualiser dans son époque. Pour répondre à cette problématique, nous verrons dans un premier temps comment les dimensions