Commentaire composé oeuvre de chair
Extrait de : THÉRIAULT, Yves (1997). « L'agneau de paix » dans Œuvre de chair, 2e édition, Montréal, Éditions TYPO, p. 108-109, 112. Bon, que pouvait faire Boris? Annuler son plan? Ce ne serait pas sage. Accepter la présence de Serge et jouer en quelque sorte le tout pour le tout? Il préféra risquer, et acquiesça à la présence de Serge. L'important, c'était de concevoir des atouts culinaires imbattables. Sur-le-champ, Boris inventa une recette. Elle lui trottait dans la tête depuis un temps déjà. Pendant qu'il essayait d'imaginer des façons de ramener Jacques à lui, son subconscient restait convaincu de l'efficacité d'un bon repas servi en douceur, sans acrimonie : un levier de frappe carrément plus puissant que tout autre. La recette, elle avait été là, en attente, se concrétisant petit à petit, s'améliorant de jour en jour. Amoureusement, le cœur gonflé d'espoir, l'âme pleine de grandes et longues musiques douces, Boris se mit à la suave tâche de préparer ce repas qui marquerait l'un des plus importants jalons de sa vie. Ce serait après des hors-d'œuvre savamment concoctés, une épaule d'agneau le plat favori de Jacques qu'il avait lui-même choisie chez le boucher. Il prépara d'abord une marinade. Dans un litre et demi de vin rouge, il mit une demi-poignée de baies de genièvre, un peu de basilic, un peu de romarin, une tasse d'huile d'olive, une carotte râpée, un oignon râpé, deux gousses d'ail, des grains de poivre, un peu de persil et une paume de sel. Il fit cuire le mélange à feu doux pendant une demi-heure, et le mit à refroidir. Pendant ce temps, il avait préparé trois cassolettes d'huîtres assaisonnées de curry et d'oignons émincés, recouvertes de minces lamelles de pommes de terre et de feuilles de laurier. Les cassolettes de fine faïence iraient au four une heure avant le repas, à feu chaud. Pour les baigner, Boris lissa sur le contenu gros comme une noix de beurre, et posa une abaisse de pâte au son. Puis la marinade