La santé : à la poursuite d’une utopie (sciences humaines-hors série n°48)
Une bascule s ‘est opérée dans la conception de notre santé : entretien avec D. LECOURT (sciences humaines-Hors série n°48)

Proust est à la recherche de son temps perdu, notre société, elle, est à la poursuite de la santé parfaite ; la santé, en effet, est devenue un leitmotiv, une préoccupation majeure de notre société. Bien que cette préoccupation fut déjà présente dans le passé, elle n’a cessé d’évoluer, de prendre des formes différentes traînant dans son sillage de nombreux constats et problématiques. Ces derniers sont mis en lumière dans les deux articles du hors-série n°48 du magazine sciences humaines.

La santé a toujours (et déjà dans le passé) été une obsession majeure de la société. Elle tient une place centrale teintée d’omnubilation. Effectivement, la prolifération de la presse santé, des produits de santé, des thalassothérapies et cures thermales en tout genre témoigne clairement de cette obsession, transformant ainsi la santé en bien de consommation.
Cependant même si la quête de la santé parfaite était déjà présente auparavant, ses tenants et aboutissants ont tout de même évolué ; « il s’est opéré une bascule » estime Dominique Lecourt, professeur à l’université Pais-VII ; la santé, aujourd’hui, est devenue une exigence pour soi-même. Ainsi, cette conception contemporaine de la santé entraîne une intensification de l’exigence envers la santé elle-même. La mise en place de politiques de santé permet de répondre à ces nouvelles exigences tout en nourrissant un intérêt constant de la part des individus à son égard. Cependant, ces politiques de santé aspirent de plus en plus à dicter les comportements à suivre, au risque de tendre vers une société trop hygiéniste, aseptisée qui « médicalise l’existence ». Cet excès de santé affaiblit finalement la santé ; Ivan Illich, un philosophe autrichien, constate deux choses : d’une part, il observe une