Corpus français théatre
Le double jeu
Britannicus de Racine, les extraits des Fourberies de Scapin de Molière et
On ne badine pas avec l’amour de Musset offrent au spectateur des situations théâtrales complexes. En effet, dans chacune de ces scènes, l’un des personnages joue un double jeu, c’est-à-dire qu’il a une identité différente ou tient un discours différent selon son interlocuteur.
Junie, qui sait que son entretien avec Britannicus est épié par Néron et que le sort de son « amant » (au sens du XVIIe siècle) dépend de ses propos, doit feindre la froideur et cacher son amour pour lui : Britannicus ne comprend pas ce « discours » qui le « surprend » et en arrive aux conjectures les plus douloureuses : « Néron vous plairait-il (…) / Éclaircissez le trouble où vous jetez mon âme ». Junie, qui ne peut répondre, tente de donner à Britannicus des indices : « Jamais l’Empereur n’est absent de ces lieux », mais en vain.
La jeune femme est au supplice.
Le jeune Perdican aime Camille qui pourtant le repousse. Pour se venger d’elle et par provocation, il badine avec une jeune paysanne Rosette et lui déclare son amour, alors qu’il sait que Camille, cachée, l’entend… Les paroles de Perdican, qui ont plusieurs destinataires, prennent un double sens, ce qui donne à ce jeu une résonance pathétique. La déclaration d’amour à Rosette a en fait deux destinataires (comme en témoigne la didascalie « à haute voix, de manière que Camille l’entende ») dont l’une sert d’instrument pour blesser l’autre ; elle a un sens pour Rosette et en prend un autre pour Camille. L’expression même cultive l’ambiguïté et