Cour d'introduction
Vertu au sens grec d’excellence dans la conduite (ethos ou habitus qui consiste en une justesse ontologique, intime), valeur impliquant l’idée d’une norme instituante, enfin institution sans laquelle la coexistence humaine serait livrée à l’anomie et au chaos,la justice s’impose à nous tout à la fois comme : 1- une espérance, peut-être toujours déçue ; 2- une exigence, ravivée par un constat d’injustice dénoncée comme un scandale qui appelle jugement ; 3- une nécessité.
Pourtant à la question, essentielle, philosophique par excellence, puisque ontologique, morale, éthique, sociale, juridique et politique : « qu’est-ce que la justice ? », nous ne pouvons répondre par une définition univoque. La 1ère difficulté vient de ce que la réflexion sur la justice naît le + souvent d’un sentiment, incertain et impur, de justice, sentiment suscité par la révolte devant l’expérience la + commune qui soit : l’injustice. Or nous sommes tentés : soit de nier l’existence de la justice, chimère démentie par un principe de réalité régi non par le droit, mais par le fait; soit de corriger mentalement, c.à.d. fictivement une situation d’iniquité enérigeant en principe de justice un schème idéal, mais purement formel, partant conflictuel, et surtout inadéquat à un réel qui le dément. Le principe aristotélicien d’égalité, arithmétique (égalité des parts) ou proportionnelle (égalité des rapports) fournit ainsi un principe régulateur et normatif, qui débouche sur une formule problématique : suum cuique tribuere, « donner à chacun le sien », « attribuer à chacun sa part ». Mais si la justice d’Athéna parvient, au dénouement de la trilogie de l’Orestied’Eschyle, à rendre un jugement équitable, qui satisfasse in fine toutes les parties et qui rétablisse ou +tôt refonde un ordre bouleversé par la logique du système vindicatif, ce n’est qu’en corrigeant l’injustice engendrée par l’application littérale du