Cours La Mise En Spectacle De La Parole Et Des Emotions
PAROLE ET DES EMOTIONS
I. Introduction
Loin d’être circonscrite aux manifestations publiques, la mise en spectacle de la parole s’opère dès que celle-ci s’adresse à autrui. La conversation la plus banale est déjà une mise en spectacle, pour la simple raison que tout ce qui entoure la parole (gestes, posture, regard, etc.) contribue à la visée de la parole : emporter l’adhésion. Nous adaptons sans cesse notre manière d’être et notre discours à notre intention première et à la réception chez autrui : de fait, tout échange communicationnel est une sorte de jeu d’acteur composé et dirigé vers notre interlocuteur, que nous voulons convaincre de notre bonne foi. Cette représentation, naturelle, est d’autant plus pensée et travaillée dans les espaces publics de communication, où il s’agit d’emporter l’adhésion d’un grand nombre de personnes très différentes. Cette question rappelle que parler est une action sur autrui, et que la démocratie, en affirmant la liberté d’expression de tout un chacun, entraîne une mise en spectacle permanente et inévitable de toute communication. Il est donc primordial de savoir décrypter ces mises en scènes afin de séparer parole et jeu, vérité et rhétorique, parole sincère et mensonge intéressé.
Le souci de la mise en spectacle, étymologiquement la « mise à vue » (spectare, « voir » en latin), obéit à deux intentions contradictoires mais non incompatibles : la vérité, ou le mensonge.
Illusion théâtrale, mensonge du comédien, vérité du jeu d’acteur, etc., sont autant d’expressions courantes qui soulignent l’enjeu de la représentation de la parole et des gestes qu’elle appelle. La possibilité et les modalités de la représentation de la parole interrogent et fascinent les hommes depuis des millénaires : dans l’Antiquité et jusqu’à la IVe République, la formation d’élite, à laquelle chaque enfant scolarisé goûtait à un moment ou à un autre, était la formation rhétorique (« classe de rhétorique »). La Grèce et la Rome