DECRYPTAGE : Toyota, une victoire au goût amer
Le constructeur japonais est devenu le numéro un mondial. Mais il n'aura pas le coeur à déboucher le saké compte tenu de la crise qui frappe le secteur automobile, estime David Barroux, rédacteur en chef Industrie.
La victoire est symbolique mais la victoire est amère : en 2008, Toyota aura vendu plus de voitures que General Motors (9 millions contre 8,4 millions). Pour la première fois en soixante-dix sept ans la couronne de numéro un mondial de l'automobile change de camp et de continent.

Toyota ne va cependant pas déboucher le saké pour fêter cet événement. Dans un contexte de crise mondiale de l'automobile, plus que sa rivalité avec GM et les autres constructeurs, ce sont les problèmes internes qui préoccupent le champion nippon. La firme, qui va afficher sur l'exercice en cours les premières pertes d'exploitation de son histoire, ne fait plus désormais de la croissance à tout prix sa priorité. La clef est bien plus de renouer avec la profitabilité. Quitte à produire moins, à geler des projets d'usines et à ne pas renouveler des milliers de contrats de travailleurs intérimaires.

Si Toyota trébuche alors que le groupe semblait jusque là invincible c'est que l'heure est particulièrement grave. C'est avant tout l'effondrement du marché nord-américain qui est venu terrasser le groupe japonais. Premier marché (un tiers de ses ventes en volumes) et premier pôle de croissance de Toyota, l'Amérique est la clef de la rentabilité du constructeur. Lorsque les Etats-Unis toussent, Toyota tombe gravement malade. Surtout si dans le même temps l'évolution des parités monétaires joue contre les producteurs japonais (quand le yen se renforce face au dollar les voitures produites au Japon coûtent plus cher à fabriquer et rapportent moins lorsqu'elles sont vendues aux Etats-Unis). Comble de malchance, la demande ralentit également sur tous les autres marchés, privant Toyota du moindre relais de croissance (ses ventes