Croissance et finance
-------------Toute réflexion sur le lien entre finance et croissance butte sur trois difficultés majeures. La première consiste à définir et mesurer le « développement financier ». La seconde consiste à démêler l’écheveau des causalités évidemment croisées entre le développement des systèmes financiers et la croissance. La troisième a trait à la définition de politiques publiques adaptées, susceptibles de trouver un équilibre satisfaisant entre les imperfections des marchés, qui peuvent se traduire par des crises extrêmement graves, et les coûts de politiques réglementaires inadaptées, mais aussi de guider le développement financier pour en maximiser l'impact sur la croissance à long terme. Sur ces trois points, d’importants progrès ont été réalisés dans les vingt dernières années, mais d’importantes questions demeurent. Jusqu’aux années 90, ce thème était en fait relativement négligé dans la réflexion économique dominante. Les liens entre l’économie réelle et l’économie financière étaient peu étudiés. Les théories de la croissance ne faisaient aucune place au rôle du secteur financier. Il fallait remonter à Schumpeter pour trouver une analyse substantielle du rôle du crédit. Schumpeter considérait en effet que l’entrepreneur et le banquier représentaient les deux acteurs complémentaires du processus d’innovation. Après lui, les travaux se sont plutôt concentrés sur le rôle de l’entrepreneur. La littérature économique sur les systèmes financiers connaît un certain renouveau dans la seconde moitié du 20ème siècle, notamment avec les travaux de Gurley et Shaw [1955] qui identifient une relation significative entre les intermédiaires financiers et la croissance. Goldsmith [1969] consacre une étude importante au rôle de la structure financière dans le développement. Puis McKinnon [1973] et Shaw [1973] soulignent l’effet négatif de la répression financière (plafonnement des taux d’intérêt, politique d'allocation sélective du crédit,