Culture générale : une grande religion n'est-elle qu'une secte qui a réussi ?
INTRODUCTION
Marcel Gauchet, précisant sa théorie (parfois un peu caricaturée) d’un « désenchantement du monde », dans un ouvrage de 2003 intitulé Un monde désenchanté ?, rappelait que s’il y a bien sécularisation du pouvoir politique dans nos sociétés occidentales, il n’y a en rien disparition du religieux. En effet, les dernières années tendraient plutôt à accréditer la thèse d’un retour en force de la spiritualité. La nécessité pour l’homme de jeter des ponts (le terme latin de pontifex, faiseur de ponts, désignait le prêtre) entre la dimension concrète de la réalité et une réalité transcendante valut à l’espèce humaine le nom d’homo sapiens et l’évolution des sociétés humaines vers un univers de technique ne semble pas pouvoir effacer cette disposition. Relier un « au-delà » à un « en deçà », c’est proprement le sens étymologique du mot « religion », comment penser dès lors que certaines religions pourraient être plus grandes que d’autres sans hiérarchiser différentes formes de sacré, ce qui serait dénué de sens, le sacré ne se prêtant à aucune mesure ? Nous considérons néanmoins certaines religions comme « grandes », ce sont celles qui s’imposent à notre pensée lorsque nous nous figurons le religieux : le christianisme, l’islam ou le bouddhisme, par exemple ; mais nous voici de nouveau face à un problème car ces grandes religions sont elles-mêmes des nébuleuses de croyances et sensibilités. Parmi ces multiples interprétations, certaines sont des sectes condamnées comme hérésies par les institutions religieuses, d’autres sont simplement ignorées. Si dans bien des pays de tradition libérale il n’est pas gênant de professer une foi d’inspiration hétérodoxe, en France, la teneur négative du terme de « secte », terme qui n’existe pas chez les Anglo-saxons, expose celui qui confesse une foi inhabituelle à la réprobation, voire à la sanction légale. Dans un pays où l’identité