Dictionnaire philosophique
Le projet de rédaction d'un dictionnaire qui compilerait les principales idées du parti philosophique aurait germé vers 1750 dans l'entourage du roi Frédéric II de Prusse, à la cour duquel vivait Voltaire à cette époque. L'arrivée à Berlin en 1752 de l'abbé de Prades, collaborateur de l'Encyclopédie, chassé de France pour avoir diffusé les idées de Locke dans une thèse de théologie, les aurait conduit à projeter la réalisation d'une somme qui, débarrassée de la prudence dont devait faire preuve les encyclopédistes français, aurait dévoilé sans fard au public les idées des philosophes. Mais cette œuvre collective ne vit jamais le jour, en raison notamment de la brouille qui éclata entre Voltaire et Frédéric II et qui conduisit à la fuite du premier en 17531.
Quelques temps plus tard,en 1755-1756, Voltaire est approché par Diderot, et surtout par d'Alembert, qui l'invitent à participer à l'aventure de l'Encyclopédie. Il s'enthousiasme pour le projet, recrute des collaborateurs, commande et écrit des articles. Mais l'article « Genève », commandé et inspiré par Voltaire, provoque un énorme scandale à Paris et dans la cité helvète : les protestants récusent ce texte, qui les présente comme des Déistes, tandis qu'en France la parution de l'Encyclopédie est suspendue. Après un échange épistolaire entre Diderot et Voltaire, qui le presse de s'exiler, ce dernier interrompt sa collaboration. De toute façon, il en est venu à penser que l'Encyclopédie est trop volumineuse pour être une arme véritablement efficace2.
C'est en 1763 que Voltaire revient à son idée d'un ouvrage qui condenserait l'essentiel de ses idées philosophiques, morales, politiques et religieuses. Il est alors au sommet de sa gloire : historien, dramaturge, poète, polémiste,