Duman, kean
Annonce du plan : Dans un dialogue dramatique, elle révèle, face à un Kean plus réservé, sa personnalité passionnée d’héroïne romantique et fait l’éloge du théâtre et de ses vertus.
I. La progression dramatique du dialogue : régularité, variété et suspense
1. La structure de la scène : régularité et variété
La scène se déroule au rythme du récit d’une guérison presque miraculeuse – trois jours ont suffi – marquée par des repères temporels précis : commencée « le jour même » (l. 9), dans « la soirée » du premier jour, et se poursuit « Le surlendemain » (l. 32), puis « Le lendemain » (l. 40).
Ce long récit progresse en quatre temps, sensibles dans la mise en page même : quatre longues répliques d’Anna sont à peine interrompues par trois questions laconiques de Kean, construites symétriquement, qui donnent au récit sa régularité mais aussi l’accélèrent.
2. Une guérison miraculeuse
Anna, dans les lignes qui précèdent l’extrait, décrit les symptômes de sa maladie – une grave « dépression » (on parlait alors de « neurasthénie ») –, qui la rendait indifférente à tout comme le marque la triple négation (« Je ne désirais rien, je n’espérais rien, je n’aimais rien »). À la fin de la scène, elle rappelle cet état critique, toujours sous le signe de la négation, dans un groupe ternaire plein d’émotion (« Je languissais sans force, sans désir, sans espoir »), ou sous le signe du manque (« mon sein était vide, mon âme en avait fui, ou n’y était pas encore descendue »...).
Son récit décrit presque médicalement son état physique : le vocabulaire du corps est très présent – « sang, cœur, yeux, oreilles, mains, bouche... » –, ainsi que celui des fonctions vitales : « respirer, parler, dire », « toutes les sensations amassées ». Anna énumère les symptômes cliniques qui marquent le début de la guérison : elle éprouve un sentiment « douloureux », puis un éblouissement («m’éblouirent»), une sensation d’étouffement; « muette et immobile », « froide et silencieuse