Désirer (du latin desiderare: regretter l'absence de quelque chose), c'est tendre vers, se représenter et rechercher un objet dont on attend imaginairement une satisfaction. Le désir, état de tension psychique lié au manque, requiert de son objet qu'il exerce une séduction d'origine inconsciente. L'étymologie du désir exprime une confusion: si le désir est une quête tendue vers l'avenir, il exprime aussi la nostalgie: comme si, à travers le désir, nous recherchions un objet passé, perdu ou disparu. Dès lors, désirer, est-ce errer ? Le sujet appelle à définir l'essence du désir. « Errer » peut renvoyer à deux perspectives. D'une part, errer, c'est rechercher un but déterminé et ne pas parvenir à l'atteindre. L'errance désigne un voyage où nous n'arrivons jamais à « bon port »: se perdre, désorienté, s'égarer en chemin. Dès lors, errer renvoie au vocabulaire de l'erreur. Et il semble en effet qu'en désirant, nous nous trompons régulièrement d'objet (comme si l'objet conscient de notre désir n'était qu'un leurre). Un premier problème se pose d'emblée, concernant la valeur (illusoire ou non) de l'objet du désir. Peut-on connaître l'objet de nos désirs ? Le désir sait-il ce qu'il cherche ? Et par là même, peut-il atteindre son but, ou est-il condamné à l'errance ? Mais le verbe « errer » implique une autre perspective, cette fois positive. Errer ne signifie pas nécessairement se perdre en chemin, mais vagabonder, voyager sans but ni destination. Dès lors, reconnaître que le désir est une errance, ne le renvoie plus du côté de l'erreur. Au contraire, le désir serait le signe même de notre liberté. Par opposition à l'animal (qui n'éprouverait pas de désirs, mais des besoins et des instincts biologiquement déterminés), l'homme est l'être indéterminé: ses désirs n'ont pas de but préalablement défini, signe que son existence n'est pas soumise au déterminisme. Le problème central apparaît donc. Reconnaître que le désir est, par essence, errance, est-ce le caractériser comme