Ecriture et civilisation en mésopotamie.
Dans le monde qui nous entoure, où l' usage de l'écriture est universel, on trouve en somme "naturel" un tel usage, et nul ne se demande d'emblée comment et quand il aurait été inauguré. L' écriture nous apparaît comme un élément aussi indispensable à notre vie que le feu, l'outil et le langage, et il ne nous vient pas facilement à l'idée qu'elle ait jamais pu être absente de notre passé.
Pourtant si l'on remonte un peu haut dans le temps et si l'on se transporte un peu loin dans l'espace, on ne met guère à s'aviser que le plus grand nombre des centaines de langues parlées entre les hommes n'ont jamais été écrites même si, de nos jours, beaucoup d'entre elles ont subi, à la fin, une alphabétisation tout à fait allogène au développement culturel, "interne" de ceux qui parlent.
L'écriture n'est donc pas "naturelle": c'est un fait de civilisation, et c'est originairement le fait d'un nombre fort réduit de civilisations. Voilà pourquoi, en dépit du prodigieux disparate de leurs formes, toutes les écritures contemporaines se ramènent en fait à deux ou trois modèles, et peut-être encore moins: mise à part l'idéographie chinoise, seule de son espèce, les écritures syllabiques, de l'Inde et de ses alentours, remontent à la seule brâhmî, trois ou quatre siècles avant notre ère; et toutes celles de type alphabétique, dans l'univers entier, sont dérivés directement ou non, du premier alphabet, mis au point par les "Phéniciens", voici quelque trente-cinq siècles.
Avant cet alphabet, les seules civilisations connues qui aient pratiqué l'écriture se sont peut-être inspirées, elles aussi, chacune à sa façon et en son temps, du prototype mésopotamien C'est en effet dans la partie inférieure de ce qui est aujourd'hui l'Iraq, entre Bagdad et Bassorâ, aux alentours de –3000, qu'est apparu, pour la première fois au monde, un procédé calculé pour extérioriser et fixer tout ce que le langage peut exprimer de la pensée humaine. L'écriture est