Escursionniste du luxe
Le marché du luxe n'est plus réservé à une élite. Depuis une quinzaine d'années, la plupart des achats sont effectués par des clients occasionnels. Dans de telles conditions, la gestion d'une entreprise de luxe constitue un exercice délicat.
En élaborant leur stratégie marketing au niveau mondial, les responsables d'entreprises de luxe doivent décider quelle vision du marché anime leurs efforts. Certains considèrent que, pour l'essentiel, leur clientèle s'identifie à un noyau relativement limité et homogène de clients privilégiés qui ont érigé le luxe en « art de vivre ». Avec ses quelque 4.000 clients répartis de par le monde, la haute couture illustre, mieux que tout autre secteur, un telle exclusivité.
Les managers qui adoptent cette vision ne voient aucune raison d'adapter tout ou partie de leur politique commerciale. Les produits vendus sont identiques partout, de même que les campagnes de communication. En outre, un réel effort d'harmonisation des prix de vente et des circuits de distribution est entrepris. On s'efforce de toujours bénéficier de la meilleure qualité et de la meilleure créativité possible et d'être présent dans les meilleurs points de vente et les médias les plus prestigieux.
D'autres managers du luxe, en revanche, ne partagent pas ce point de vue. Ils observent que, depuis une quinzaine d'années, le marché du luxe a beaucoup changé. Des produits et des marques longtemps réservés à une élite sont aujourd'hui acquis par une clientèle beaucoup plus large, et les « happy few » se sont vus rejoints, parfois à leur corps défendant, par les « happy many ».
Pour une large part, ce courant de diffusion résulte de la décision d'entreprises comme Cartier, Cardin ou Yves Saint Laurent de rendre leur offre plus accessible en proposant des accessoires qui abaissent le prix du « ticket d'entrée » dans la marque. Même les joailliers de la place Vendôme ont ouvert, à côté de leurs magasins traditionnels, des