Est-ce la fin de l'histoire?
Bernard Bourgeois, membre de l’Académie des sciences morales et politiques, observe que l’affirmation de la fin de l’histoire est double : elle pose d’abord que l’histoire est, par essence, finie, ensuite que sa fin existe maintenant.
Ensuite, Bernard Bourgeois examine à quelles conditions, internes à la pensée, ont un sens : le jugement d’essence : "l’histoire a une fin" le jugement d’existence : "la fin de l’histoire, c’est aujourd’hui".
Voici le texte intégral de sa communication :
La fin de l’histoire est devenue l’objet d’une question non seulement philosophique, mais plus largement politico-culturelle, lorsque, il y a une quinzaine d’années, l’antagonisme de l’Est et de l’Ouest, dans lequel on voyait le moteur des vicissitudes historiques, s’est arrêté dans l’effondrement du protagoniste oriental. Alors que c’est à l’Est que l’on avait affirmé pendant des décennies réaliser la fin déjà chantante de l’histoire, la proclamation que cette histoire était finie se fit soudainement occidentale. Et ce fut - c’est tout un symbole - dans le propos d’un Extrême-oriental venu boucler dans l’Ouest absolu de l’Amérique l’immense parcours de l’aventure humaine du levant au couchant. Ce propos surprit, choqua, fit rire : l’histoire n’enseigne-t-elle pas qu’elle est toujours nouvelle, comme la nécessité ou la liberté, peu importe, qui s’exprime en elle ? Francis Fukuyama, lui, n’est pas vraiment nouveau, il n’est pas, tant s’en faut, l’inventeur du thème, mais son intervention contribua à faire accéder ce thème au statut d’une question devenue manifeste et publique, tandis que, auparavant, il n’existait encore guère comme question à l’Ouest, et, à l’Est, ne faisait plus question dans sa solution dogmatiquement imposée. Notre Académie consacre aujourd’hui une telle question, question à laquelle, Monsieur le Président, vous m’avez commis, mais aussi mis, car elle est totale, donc