Etat providence : crise ou mutation ?
« Point de propriété sans liberté, point de liberté sans sûreté » est l’aphorisme de Pierre Samuel du Pont de Nemours (1739-1817), homme politique et économiste français. Le terme « sûreté » peut être considéré en son sens régalien, mais il évoque ici une réalité bien différente puisqu’il s’agit de sûreté matérielle.
C’est ainsi que l’Etat, qui est initialement limités à ses fonctions régaliennes (armée, battre monnaie, diplomatie, justice, police…), se verra assigner une nouvelle fonction. Cette nouvelle fonction est celle de garantir à la population un niveau minimum de bien-être notamment au travers d’un système de protection sociale, ce qui va donner la conception de l’Etat providence.
Cette conception d’Etat providence, qui s’oppose à celle de l’Etat Gendarme, voit le jour sous le Second Empire, en Allemagne à la fin du XIXème siècle sous le régime « bismarckien » et se diffuse très rapidement en Europe. Esping Andersen (né en 1947), économiste et sociologue danois, démontre que trois systèmes coexistent : le modèle bismarckien, qui est conservateur, repose sur un système d’assurance sociale obligatoire généralisée (Allemagne, France…), le modèle béveridgien, qui est plus libéral, s’appuie sur une logique d’assistance et non d’assurance et accorde le rôle premier aux mécanismes de marché (Etats-Unis, Grande-Bretagne…) et le modèle social-démocrate, qui repose sur des interventions fortes de l’Etat et assure une protection sociale élevée (Norvège, Suède…).
Malgré cette multiplicité de régimes, il existe, comme le montre Richard Musgrave (1910-2007), économiste américain, des fonctions théoriques : * fonction allocation : l’Etat doit effectuer des dépenses pour le fonctionnement de son administration et doit allouer des ressources à certains secteurs produisant des biens collectifs (ex : éducation nationale), * fonction stabilisation : l’Etat stabilise les fluctuations économiques par des politiques