Extrait encyclopedie, article philosophe, dumarsais
Les autres hommes sont emportés par leurs passions, sans que les actions qu’ils font soient précédées de la réflexion : ce sont des hommes qui marchent dans les ténebres ; au lieu que le philosophe dans ses passions mêmes, n’agit qu’après la réflexion ; il marche la nuit, mais il est précédé d’un flambeau.
Le philosophe forme ses principes sur une infinité d’observations particulieres. Le peuple adopte le principe sans penser aux observations qui l’ont produit : il croit que la maxime existe pour ainsi dire par elle-même ; mais le philosophe prend la maxime dès sa source ; il en examine l’origine ; il en connoît la propre valeur, & n’en fait que l’usage qui lui convient.
La vérité n’est pas pour le philosophe une maîtresse qui corrompe son imagination, & qu’il croie trouver par-tout ; il se contente de la pouvoir démêler où il peut l’appercevoir. Il ne la confond point avec la vraisemblance ; il prend pour vrai ce qui est vrai, pour faux ce qui est faux, pour douteux ce qui est douteux, & pour vraisemblable ce qui n’est que vraisemblable. Il fait plus, & c’est ici une grande perfection du philosophe, c’est que lorsqu’il n’a point de motif propre pour juger, il sait demeurer indéterminé.
Le monde est plein de personnes d’esprit & de beaucoup