Fable ou histoire
Fable ou histoire
Un jour, maigre et sentant un royal appétit,
Un singe d'une peau de tigre se vêtit.
Le tigre avait été méchant, lui, fut atroce.
Il avait endossé le droit d'être féroce.
Il se mit à grincer des dents, criant : je suis
Le vainqueur des halliers, le roi sombre des nuits !
Il s'embusqua, brigand des bois, dans les épines;
Il entassa l'horreur, le meurtre, les rapines,
Égorgea les passants, dévasta la forêt,
Fit tout ce qu'avait fait la peau qui le couvrait.
Il vivait dans un antre, entouré de carnage.
Chacun, voyant la peau, croyait au personnage.
Il s'écriait, poussant d'affreux rugissements :
Regardez, ma caverne est pleine d'ossements ;
Devant moi tout recule et frémit, tout émigre,
Tout tremble ; admirez-moi, voyez, je suis un tigre !
Les bêtes l'admiraient, et fuyaient à grands pas.
Un belluaire vint, le saisit dans ses bras,
Déchira cette peau comme on déchire un linge,
Mit à nu ce vainqueur, et dit : tu n'es qu'un singe.
Jean de La Fontaine, Fables, II, 15, « Le Coq et le Renard », (manuel, p. 286).
Le Coq et le Renard
Sur la branche d'un arbre était en sentinelle Un vieux Coq adroit et matois. "Frère, dit un Renard, adoucissant sa voix, Nous ne sommes plus en querelle : Paix générale cette fois. Je viens te l'annoncer ; descends, que je t'embrasse. Ne me retarde point, de grâce ; Je dois faire aujourd'hui vingt postes sans manquer. Les tiens et toi pouvez vaquer Sans nulle crainte à vos affaires ; Nous vous y servirons en frères. Faites-en les feux dès ce soir. Et cependant viens recevoir Le baiser d'amour fraternelle. - Ami, reprit le coq, je ne pouvais jamais Apprendre une plus douce et meilleur nouvelle Que celle De cette paix ; Et ce m'est une double joie De la tenir de toi. Je vois deux