Famille et socialisation
Pierre Martinot-Lagarde
Quelles peuvent être les finalités d’une politique familiale aujourd’hui ? Son fondement démographique s’est peu à peu érodé. Mais on peut s’accorder sur le rôle de socialisation que remplit la famille. Dès lors, l’Etat a la charge d’un soutien apporté aux parents, aux jeunes parents en particulier, et aux réseaux de la parenté « élargie ».
D
epuis son entrée en fonction, le gouvernement de Lionel Jospin a manifesté son intérêt pour la famille, souhaitant rénover le traitement politique des questions familiales. Rapports, commissions, conférences annuelles se succèdent. Un ministère délégué à la Famille a été créé. Ici, il s’agit de renforcer l’autorité parentale. Là, de soutenir les familles affrontées à des crises. Pourtant, dans le même temps, des membres du gouvernement prennent des options en contradiction avec ce souci affiché. Au nom des droits individuels, l’autorité parentale est contrée dans l’infirmerie de l’école. La sourde lutte, récurrente dans l’univers politique, entre la défense de la famille et celle de l’individu se poursuit-elle? Ou bien les formules du Premier ministre 1, qui appelle de ses vœux une politique de soutien aux familles, tracent-elles une nouvelle voix après un siècle de polarisation, d’affrontement et de compromis? Le passage du singulier au pluriel – d’une politique de la famille à une politique des familles – veut inscrire une double rupture au nom du réalisme. D’une part, la tension traditionnelle serait dépassée : entre indi-
1. « Allocution lors de la Conférence de la Famille », Services du Premier ministre, 2000.
Projet 266-2001, pp. 23-31, 14 rue d’Assas 75006 Paris
Pierre Martinot-Lagarde
vidualisme et familialisme, choix personnels et liens familiaux, des conceptions autrefois sacralisées, que traduisaient ces célèbres formules « Famille, je vous hais ! » vs la famille « cellule de base de la société ». Mais, d’autre part, au nom du même réalisme, se