Gianini belotti
Texte Du côté des petites filles, Elena Gianini Belotti, 1992
J'ai entendu un petit garçon d'environ cinq ans qui suivait sa mère au supermarché, insister pendant toute la durée des achats pour avoir un savon à lessive. « Mais quand est-ce que je la ferai, moi, la lessive ? » demandait l'enfant avec obstination. « Tu ne peux pas faire la lessive, toi », lui répondait sa mère, inflexible, « tu es un garçon. » « Mais, je veux faire la lessive avec du savon », insistait l'enfant, la mère ne lui répondait même plus, jusqu'à ce que le petit garçon aille vers un rayon, prenne un savon et le dépose dans le chariot. La mère, furieuse, le remit sur le rayon et réprimanda sévèrement l'enfant, qui se mit alors à pleurer de rage. La mère fut inexorable. Il est sûr qu'après un refus aussi significatif, sans appel, ce petit garçon n'essaiera plus de demander du savon pour la lessive et orientera ses demandes vers d'autres objets dont il aura appris à reconnaître qu'ils sont permis.
Une jeune femme me racontait qu'elle se souvenait encore très bien d'un sentiment aigu de culpabilité qu'elle avait éprouvé lorsque, à sept ans, elle avait surpris sa mère se plaignant auprès d'une amie de ce que sa fille n'aimât pas jouer à la poupée ; à partir de ce moment là, elle s'y efforça, désireuse de correspondre à tout prix à ce que sa mère attendait d'elle, d'avoir son approbation et de lui plaire, mais elle continua à préférer les jeux mouvementés.
J'ai eu l'occasion d'observer souvent dans les crèches où on laisse à l'enfant le libre choix de ses jeux, de ses objets et de ses activités, que les fillettes jouent tout autant que les garçonnets avec des petites voitures, des avions, des bateaux, etc. jusqu'à trois ans environ. J'ai vu des petites filles de dix huit à vingt mois passer des heures et des heures à sortir d'un sachet de toile une quantité de petites voitures, d'avions, d'hélicoptères, de bateaux, de petits trains, les aligner