Histoire(s) des arts et de la guerre
Par Lila Gleizes et Claire Magnaval-Surtukian
Introduction
La guerre a toujours occupé une place de choix dans l'art. Objet de peur et de fantasme, instrument d'honneur et de destruction, elle a nourri les représentations artistiques depuis les temps antiques. Elle a été glorifiée à travers l'histoire de combattants illustres, comme les héros de la guerre de Troie, ou encore dans la célèbre Chanson de Roland, qui narrait la mort du neveu de Charlemagne. Au temps des guerres napoléoniennes, si la plume engagée de certains auteurs s'acharnait contre l'empereur, des tableaux tels que celui de David faisaient encore l'éloge du chef de guerre. Il a ainsi fallu attendre le XXIème siècle pour que le visage de la guerre, changé a jamais, suscite enfin une horreur unanime.
Plusieurs éléments ont participé de cette évolution dans la perception des conflits armés. D'abord, les armes, plus meurtrières, plus impersonnelles aussi : il est devenu plus facile de tuer. La médiatisation de ces atrocités, aussi, de plus en plus incontrôlable avec le développement de nouveaux moyens de communication. La stabilisation des frontières et des politiques, qui remplace la conquête territoriale par la conquête idéologique, participe de ce mouvement et rend les enjeux plus difficile à cerner. Plus simplement, un changement d'état d'esprit se fait jour : avec l'avancée de la médecine, l'allongement de l'espérance de vie, l'accroissement de l'individualisme, la mort n'est plus un fait banal et tolérable.
On pourrait poursuivre encore cette trop longue et douloureuse énumération.
Cependant, une évidence déplaisante est à prendre en considération : la guerre, telle qu'on l'a connue au XXIème siècle, a revêtu un visage bien plus violent que par le passé, et bien plus intime aussi, car pour la première fois, celle-ci empiète sur le monde civil autrefois plus épargné. Ce n'est certes pas la première fois qu'elle s'étend au-delà du