Hubert-félix thiéfaine : sweet amanite phalloïde queen
Pilote aux yeux de gélatine
Dans ce vieux satellite-usine
Manufacture de recyclage
Des mélancolies hors d’usage
Première remarque : il n’y a pas de verbe, donc pas de phrase. Simplement deux groupes nominaux qui se déploient chacun sur deux vers liés par la rime plate. Que représentent donc ce pilote et cette manufacture ? Pour la manufacture, c’est plus simple puisque, de toute évidence, le terme reprend le « vieux satellite-usine » qui précède, usine et manufacture étant synonymes. Une interprétation littérale ferait du pilote l’un des deux personnages de la scène qui va suivre, probablement la femme d’ailleurs, puisque c’est elle qui pilote la séance, comme on va le voir. Ses yeux de gélatine annoncent un monstre déshumanisé dont le regard est gélatineux, c’est-à-dire froid et impossible à saisir. Le satellite-usine est une manufacture qui conduit de manière parodique et factice vers l’espace. Ce faux univers de science-fiction est contaminé par la jouissance physique, qualifiée de « recyclage Des mélancolies hors d’usage », qui joue le rôle de machine à propulser les personnages au septième ciel ou, selon l’expression courante, de machine à s’envoyer en l’air. L’image du satellite-usine concentre donc l’idée de jouissance physique (le satellite) et celle de divertissement des soucis quotidiens (l’usine), elle crée un lieu d’évasion orgasmique hors de la désespérance du monde. Mais le choix de la manufacture n’est pas anodin, car il s’agit d’un lieu inquiétant qui évoque la présence d’appareils gigantesques et menaçants que l’on imagine prêts à fondre sur le personnage pour le cuisiner à petit