Hyppolite porte couronne
Hippolyte Porte-couronne
Ve siècle avant J.-C.
Traduction Artaud, 1842
PERSONNAGES
Vénus. Hippolyte. Suivants d'Hippolyte. Un Serviteur. La Nourrice de Phèdre. Le Chœur, composé de femmes de Trézène. Thésée Un Messager. Diane.
La scène est aux portes du palais de Thésée, à Trézène.
Vénus.
Je suis Vénus, renommée entre les déesses, et souvent invoquée par les mortels : je règne dans les cieux, sur tous les êtres qui voient la clarté du soleil, ou qui peuplent la mer jusqu’aux bornes atlantiques ; je favorise ceux qui respectent ma puissance, et je renverse les orgueilleux qui me bravent : car il est aussi dans la nature des dieux de se plaire aux hommages que leur rendent les hommes. Je montrerai bientôt la vérité de mes paroles. Le fils de Thésée, Hippolyte, né d’une Amazone, élève du chaste Pitthée, seul ici entre les citoyens de Trézène, m’appelle la plus malfaisante des divinités ; il dédaigne l’amour et fuit le mariage. La sœur de Phébus, Diane, fille de Jupiter, est l’objet de son culte, il la regarde comme la plus grande des déesses : accompagnant toujours la vierge divine à travers les vertes forêts, il détruit les animaux sauvages avec ses chiens agiles, et entretient un commerce plus élevé qu’il n’appartient à un mortel. Je n’envie point ces plaisirs ; eh ! que m’importe ? mais les outrages d’Hippolyte envers moi, je les punirai aujourd’hui même. J’ai dès longtemps préparé ma vengeance, il m’en coûtera peu pour l’accomplir.
Il était sorti de la demeure de Pitthée, pour aller, sur la terre de Pandion, assister à la célébration des augustes mystères. La noble épouse de son père, Phèdre, le vit, et fut éprise d’un violent amour, que j’insinuai moi-même dans son cœur. Avant de venir ici à Trézène, elle éleva sur la roche même de Pallas, d’où l’on découvre ce pays, un temple magnifique à Vénus, pour consoler son cœur de l’absence de celui qu’elle aimait ; et elle le consacra à la déesse,