Incipit de l'etranger
Un des incipit les plus célèbres du roman français. Avec cet incipit, le lecteur sait qu'il va avoir affaire à une voix par la focalisation interne, qu'il aura affaire à un narrateur vivant et racontant et le roman va compter moins pour les événements relatés que pour la manière dont ils sont relatés: ce qui vit Meursault est assez banal, mais ce qu'il en dit, la manière dont il le perçoit est intéressant. Ce n'est pas la première fois que cette focalisation interne est employée, mais c'est une des premières fois que la voix du roman est indicatrice de tant de choses, c'est vraiment l'homme de la modernité qui fait intrusion dans le roman avec ce JE camusien, un homme dont l'identité n'est jamais claire, est toujours ambiguë, un homme dont l'identité va en se défaisant: on n'a plus ici un personnage plein comme le sont ceux de Balzac, par ex. à la psychologie d'une clarté sommaire. Non, Meursault est étonnant, étrange, difficilement saisissable, c'est quelqu'un d'une banalité déroutante, un anti-héros incontestablement.
Analysons cet incipit. Ce qu'on peut dire, c'est que dès le départ, le héros est confronté à un événement important dans toute vie d'homme: la mort de sa mère. Evénement important, inéluctable, tellement inéluctable qu'il produit bien souvent des réaction stéréotypées. Or, comment réagit ici Meursault?
- Triste? Pas vraiment. S'en fout-il de ce décès? Cela n'est pas dit non plus.
- Il réagit de manière très pratique, très ordonnée, soucieux du bon déroulement des choses: "Je prendrai l'autobus à 2 heures et j'arriverai dans l'après-midi. Ainsi, je pourrai veiller et rentrer demain soir." Pour tout ce qui est concret et tangible, il réagit de manière maniaque et précise.
- Pas de sentiments non plus: il continue son train-train habituel (il va manger, s'endort dans l'autobus) et se révèle plus sensible à la chaleur, aux odeurs qu'à la mort de