Instinct

La houle l'embarquait au loin.

Le silence l'avait réveillée, il piétinait ses rêves, écartelait ses pensées, déchiquetait son sommeil. Elle avait crié si fort qu'elle s'empoignait désormais brutalement, se balançant d'avant en arrière. Elle se berçait, une commissure paume ouverte plaquée contre sa bouche gluante et enivrée. La bile lui collait à la peau, la souillait. Elle ne se souvenait plus très bien, peut-être qu'elle s'était sommée de se coucher, ou bien s'était-elle forcée à se taire. Elle avait toujours été intarissable. Elle rejeta la couverture de son corps trempé de sueur et se tamponna le front.
Un pied par terre, puis l'autre. Se hisser sur ses deux jambes. Marcher. Elle titubait, vacillait. Dieu, que c'était plus amusant hier soir !
Elle ouvrit en grand la porte fenêtre de sa chambre et un simple filet d'air l'incita à prendre le large.

Elle retira vaillamment ses chaussures, les lança le plus loin possible. Elle courut sur la dune à perdre haleine, trébucha, tomba, roula, émit un grognement maladif. Elle se cacha derrière les herbes telle une bête tapie et meurtrie.
Il n'y avait plus qu'à écouter désormais. Oui, écoute je t'en prie.

La vague qui s'écrase rageusement contre le sable. Il est aspiré au loin, tourbillonne en rampant au côté des coquillages. Il y a le vent qui aplatit l'écume contre le varech. L'odeur est insoutenable. Alors elle cache son nez dans le sable, enfonce ses deux mains pour y chercher la chaleur de la journée enfouie plus bas que terre.

Elle affronte désormais l'océan. Les cheveux collés sur ses temps humides, elle se déshabille lentement, défait avec précaution les boutons de gilet, fait glisser son pantalon sur ses hanches. Elle envoie valser tout cela d'un coup de pied agile. Elle crie, très fort. Elle est bestiale. Elle court tout en hurlant des mots extraordinaires. La mer est mauvaise, elle la rejoint.

Le contact avec le sel est brutal. Sa chair est à vif à certains endroits. De larges