Jean Calas, riche marchand d'étoffe et sa famille habitent au no 16 de la rue des Filatiers (aujourd'hui no 50), à Toulouse. Le 13 octobre 1761, son fils aîné, Marc-Antoine, est retrouvé pendu dans sa maison, à la poignée d'une porte de la boutique. Le corps est découvert à 22 h après le souper, qui réunissait à l'étage le père et la mère Calas, les deux fils Marc-Antoine et Pierre et un invité de passage, Gaubert Lavaisse. Ses parents déclarent l'avoir trouvé « étranglé », évoquant le crime d'un inconnu. Immédiatement appelés sur les lieux, les médecins constatent que la cravate de Marc-Antoine masque les marques d'une double strangulation. Meurtre ou suicide ? Toujours est-il que les Calas, l'invité Gaubert et la servante Jeanne Viguière, bonne catholique, sont accusés du meurtre. L'attitude de la famille est, en effet, suspecte, car celle-ci reconnaît, après trois jours d'interrogatoire à l’hôtel de ville, avoir détaché Marc-Antoine pour camoufler le suicide et éviter ainsi à ce dernier qu'il ne subisse le traitement alors infligé aux suicidés, « être traîné sur la claie » tirée par un cheval (cadavre traîné face contre terre à travers la ville ou la campagne sous les lazzis de la population, puis jeté aux ordures)4.
Mais les Calas, de confession protestante, sauf l'un des fils, Louis, converti au catholicisme et affilié à la Confrérie de pénitents blancs, continuent à pratiquer leur foi. Convaincu par des rumeurs de voisinage alléguant la volonté de Marc-Antoine de choisir réellement la religion catholique et accusant son père de l'avoir assassiné afin qu'il ne se convertisse pas, le capitoul David de Beaudrigue exige un complément d'enquête et fait soumettre Jean Calas à la question5.
Face au manque de preuves pour établir sa culpabilité, le procureur du roi Charles Laganne publie le 17 octobre 1761 un monitoire à fin de révélations. Dans ce contexte de délation, on admet les ouï-dire comme quarts de preuves et les ragots comme huitièmes de preuves. D'après