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JEAN MASSOT
LE PRÉSIDENT DU CONSEIL
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N 1946, LES PÈRES DE LA CONSTITUTION croient de bonne foi créer sur le modèle britannique un régime « résolument parlementaire », selon les termes du rapport Coste-Floret. Pour eux, cela passe par l’institution d’un « véritable chef du Gouvernement, d’un
Premier ministre au sens anglais du terme ». En effet, toujours selon le rapport, « l’une des tares les plus graves dont a souffert le régime de la
IIIe République à sa dernière époque, c’est, n’est-il pas vrai, l’instabilité ministérielle. La Commission de la Constitution l’a compris et elle s’est efforcée de porter remède à l’instabilité ministérielle. Il n’est pas une partie du projet qui ne marque la présence, dans l’esprit de ses rédacteurs, de cette préoccupation et qui ne tende à renforcer par une stabilité accrue la force de l’autorité gouvernementale ».
Même si la IVe République a effectivement eu, en douze ans, un peu moins de présidents du Conseil que la IIIe au cours des douze années précédant le désastre de juin 1940, c’est peu dire que cette ambition a été déçue. L’instabilité ministérielle a été unanimement stigmatisée, en premier lieu, bien sûr, par le général de Gaulle : les Mémoires d’espoir 1 s’ouvrent sur une dénonciation féroce du « système » qui « pendant douze ans […] fit […] ses preuves » et grâce auquel « dix-sept présidents du Conseil, constituant vingt-quatre ministères, campèrent tour à tour à Matignon […] laissant dans leur intervalle des vacances dont la durée atteignait jusqu’à plusieurs semaines » 2. Pierre Mendès France, dans
1. Le Livre de poche, 1970, p. 12 et 13.
2. Voir en annexe les précisions sur la comptabilisation des ministères et de la durée des crises. P O U V O I R S
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La République moderne 1, ne s’est pas montré moins sévère, se