Kant
Première de couverture de la Kritik der reinen Vernunft
Kant a écrit deux préfaces à la Critique de la Raison pure (1781 et 1787) dans lesquelles il explique son projet général (permettre à la métaphysique de ne plus être un champ de bataille entre philosophes et écoles opposés les uns aux autres) ainsi que le renversement qu’il veut introduire dans notre conception du savoir (c’est la célèbre révolution copernicienne). Ces préfaces sont donc essentielles pour l’intelligence du texte car elles fournissent deux des clés pour comprendre la Critique de la raison pure.
La révolution copernicienne est un renversement de notre conception habituelle de la nature du savoir. Pour expliquer cette révolution, Kant va se fonder aussi bien sur l’exemple de Thalès que sur celui de Galilée. Thalès est le premier qui a vu que les mathématiques existent grâce à des principes a priori et qu’elles sont le résultat de l’activité cognitive du sujet. Thalès a donc compris, selon Kant, que les objets mathématiques sont constitués par le mathématicien. Quant à Galilée, il n’a pas fondé sa recherche sur la simple observation des phénomènes naturels, mais, par des questions qu’il a établies lui-même a priori, il a cherché à comprendre les lois naturelles. Il a interrogé la nature afin de pouvoir la comprendre. C’est, en d’autres termes, par la mise en place d’un dispositif expérimental que la physique moderne a pu apparaître.
Or, Thalès et Galilée incarnent de façon paradigmatique la révolution nécessaire pour permettre à un certain type de connaissance de devenir scientifique. Toute discipline voulant devenir scientifique devra donc elle-même aussi apprendre que c’est le sujet qui est le fondement de la connaissance et que toute connaissance est en partie indépendante de l’expérience.
Mais la métaphysique n’ayant pas encore atteint ce statut de science, il faudra qu’elle apprenne à renverser ses perspectives. Kant indique cependant très clairement