Kateb yacine
Kateb Yacine est né en 1929 à Constantine, dans un milieu qui sut lui apporter, avec le sentiment de son appartenance tribale, un contact familier avec les traditions populaires du Maghreb. Après l’école coranique (qu’il apprécia peu), il fréquenta l’école française, pour laquelle il nourrit des sentiments contradictoires : il y était « dans la gueule du loup », mais, en même temps, il y découvrit la vertu libératrice de l’esprit critique. Le 8 mai 1945, il participe à la grande manifestation des musulmans qui protestent, à Sétif, contre leur situation inégale. Dans la répression terrible qui s’ensuit, il est arrêté, brutalisé, emprisonné : une fois libéré, il est exclu du lycée. Mais l’expérience de la prison lui a révélé « les deux choses qui [lui] sont les plus chères : la poésie et la révolution ». Proche des milieux nationalistes, inscrit au Parti communiste, il travaille un temps comme journaliste à Alger républicain, puis, en 1951, il s’exile en Europe, où il fait éditer roman et pièces de théâtre. Il rentre en Algérie en 1972, où il dirige une troupe théâtrale que les autorités préfèrent reléguer à Sidi-bel-Abbès, dans l’Ouest algérien. Ses prises de position, toujours attendues et toujours fidèles à l’esprit du soulèvement de 1954, n’ont jamais cessé d’appeler à la libération de l’Algérie (ainsi en octobre 1988, quand il proteste contre la répression des manifestations algéroises). Son œuvre, commencée en 1946 avec un recueil poétique, Soliloques, s’est développée dans l’éparpillement de publications dispersées, oubliées, reprises, récrites, étoffées ou découpées. Le Cadavre encerclé, paru dans la revue Esprit en 1954, créé à la scène par Jean-Marie Serreau en 1958, célèbre, dans une langue abruptement imagée, l’épopée du soulèvement anticolonial et, en même temps, déplore le destin tragique du héros, confronté aux tabous de sa société, à la toute-puissance et à la trahison des pères. Le roman Nedjma (1956) reprend des